Réinventer les arts africains de la scène: le grand défi du MASA 2016 à Abidjan

  • 10/03/2016
  • Source : RTBF
Le marché des arts du spectacle africain (MASA) est de retour! Après huit ans d'interruption, cet incontournable rendez-vous des professionnels de la culture accueille cette année trente neuf pays, rassemble plus d'une centaine d'artistes invités et enregistre depuis son lancement le 05 mars dernier au palais de la culture de Treichville à Abidjan, une fréquentation avoisinant le millier de visiteurs par jour.

Un coup d'envoi placé sous haute sécurité
 
A l'entrée du palais, le dispositif de sécurité est costaud comme les deux gardes qui sont en charge de l'assurer. Contrôle méticuleux, passage au détecteur de métaux, contrôle des effets personnels et capots pour les voitures, interdiction d'entrer avec des cigarettes ou un briquet: l'ombre des attentats de Paris, et la menace des groupes armés, entraînent un regain de vigilance pour tous.
 
Programmation alléchante, têtes d'affiches en vogue sur le continent et sur la scène internationale, rencontres de hauts niveau avec les professionnels de la culture et de grandes institutions comme l'UNESCO, Arterial Network, ACP Culture, Africalia et d'autres: voilà la vaste carte que propose cette neuvième édition du MASA dont le coup d'envoi a été donné le samedi dernier au palais de la culture de Treichville en plein Abidjan. Samedi soir, tout le monde presse le pas, il est hors de question de manquer les concerts que propose l'édition de relance du MASA.
 
Il est vingt et une heure quand le groupe malien Amanar investit la scène qui fait dos à la lagune. La nuit est chaude, on se bouscule derrière les barrières, ceux qui sont arrivés plus tôt ont pu choisir des places de fortune dans le jardin du palais.
 
Ahmed Ag Kaedi le leader et fondateur du groupe est accompagné d'un guitariste et d'une chanteuse. A peine la première note lancée que les sonorités maliennes du désert investissent Treichville. A quelques notes près on croirait à s'y méprendre, entendre le célèbre groupe Tinariwen. "Tinariwen est une référence pour nous", explique Ahmed Ag Kaedi qui reconnaît en ce groupe un précurseur de la musique touareg sur la scène internationale.
 
Après avoir enchaîné une série de titres, ils s'arrêtent pour entamer une chanson dédiée au Mali. Le Mali est un et indivisible scande-t-il sur scène. "Je viens de la région de Kidal au Nord.

Ce qui s'y passe depuis quelques années est révoltant. Nos enfants ne vont plus à l'école. Je vis à Bamako la capitale depuis que ma ville d'origine a été le théâtre d'atrocité en tout genre. Je lance un appel pour le retour de la paix au Mali", explique-t-il une fois le concert terminé.
 
Dans son grand bazin blanc immaculé, le regard insistant, il explique pourquoi le MASA est une opportunité en or pour son groupe. C'est l'occasion de rencontrer des diffuseurs mais aussi de faire passer des messages au reste du monde.
 
Il est encore possible de rêver et de créer en Afrique. La solution ne viendra pas de l'extérieur!
 
Dialoguer avec le reste de la planète c'était aussi l'un des objectifs de "Clameur des arènes" un spectacle de danse contemporaine qui a ouvert cette neuvième édition.
 
Plus tôt dans la journée de samedi, au centre culturel français d'Abidjan, trois danseurs, cinq lutteurs, quatre musiciens et chanteurs ont proposés à leur audience un voyage au cœur des arènes des célèbres lutteurs ouest africains.
 
Devant un mur de coussins rouges, sur une scène où lumière et pénombre flirte constamment, accompagné de la puissante voix du musicien Emmanuel Djob, les lutteurs habillés de rouge, offrent aux spectateurs différents tableaux de lutte, un sport aussi populaire que le football au Sénégal.

"En créant ce spectacle je veux créer un dialogue indique Salia Sanou concepteur et chorégraphe de Clameur des arènes. "Je veux dire aux jeunes qu'ils empruntent une fausse route s'ils pensent qu'exil rime avec réussite", assène-t-il.
 
"Il est possible de créer et de rêver en Afrique", s'exclame-t-il, en soulignant que la solution ne se trouve certainement pas sur les barques qui s'échouent sur les plages européennes. Une ode à la jeunesse africaine que le chorégraphe veut encore plus pro active.
 
Une jeunesse représentée par de talentueux artistes c'est l'une des spécificités de ce cru 2016. Moussa Petit Sergent est l'un d'entre eux. Lauréat du Grand Prix National de l'Humour en 2015 au Burkina Faso, le comédien a amusé la salle avec "Femmes enceintes, conseils pratiques", son one man show qui tourne à la dérision les préjugés liés à la grossesse en Afrique.
 
Est également attendu durant la semaine : la célèbre comédienne franco ivoirienne Tatiana Rojo, prix de la meilleure actrice du festival du film de Montréal en 2015, pour son rôle dans "Danbé, la tête haute" de Bourlem Guerdjou. En 2014 elle incarne Gigi dans les "Rayures du zèbre" du réalisateur belge Benoît Mariage.
 
Plaidoyer pour plus d'autonomie culturelle
 
Le Masa, c'est aussi la recherche de plus d'autonomie dans le secteur cultuel en Afrique comme l'a rappelé Moussa Daffé coorganisateur du Masa et directeur du festival Sur le Niger à Ségou au Mali. "Nous en sommes à notre douzième édition et lnotre festival est auto financé. Je ne dis pas que les choses sont simples mais je pense qu'il est possible de penser et de créer des initiatives qui visent à promouvoir la culture".
 
L'exemple du Festival sur le Niger a été souvent citer pendant cette édition du Marché des Arts du Spectacle Africain. Le Directeur Général du MASA, Yacouba Konaté, l'a également mentionné comme étant un exemple à suivre sur le continent...Lire la suite sur RTBF