Justice ivoirienne / Le ministre Bruno Koné révèle : « Ce qui se prépare pour Simone Gbagbo »

  • 23/09/2013
  • Source : L'Inter
Le ministre Koné Bruno, porte-parole du gouvernement ivoirien, était l'invité d'Afrique matin sur la radio Rfi, le samedi 21 septembre 2013. Il a expliqué le refus du gouvernement d'extrader l'ex-première dame, Simone Gbagbo,

Bruno Koné, bonjour ! Pourquoi refuser d'extrader Simone Gbagbo devant la Cour pénale internationale, alors que vous avez extradé son mari, l'ex-président Laurent Gbagbo, en novembre 2011 ?

Parce que, tout simplement, les deux situations sont totalement différentes. Il y a deux ans, vous le savez, la Côte d'Ivoire sortait d'une grave crise post-électorale, les juges étaient éparpillés dans la nature, la hiérarchie judiciaire était cassée, et donc tout cela ne permettait pas, en tout cas à l'époque, de pouvoir offrir à l'ex-président Laurent Gbagbo, les conditions d'un jugement équitable, objectif, indépendant. Aujourd'hui, la situation est différente. Les juridictions ivoiriennes sont en place, les juges sont là, nous avons estimé au niveau du gouvernement, que les conditions étaient réunies pour un procès juste et équitable en Côte d'Ivoire pour madame Gbagbo.

Vous avez, néanmoins, attendu 18 mois pour donner votre réponse à la CPI ?


Parce que ce genre de chose s'analyse effectivement avec du recul. Il s'agit de décision politique, il s'agit de décision qui concerne les populations ivoiriennes, et la sagesse veut que la décision prise, le soit après toutes les réflexions, après avoir pesé tous les pour et les contre, après avoir également évalué tous les avantages et les inconvénients.

Alors, une décision politique, vous venez de le dire ; que va-t-il se passer concrètement, désormais, pour Simone Gbagbo ?


La justice a déjà fait une partie du travail. Le président Alassane Ouattara l'a lui- même déjà demandé, il souhaite que la justice aille vite. Nous espérons donc que la justice, assez rapidement, se chargera de ce dossier et le traitera.

Au mois d'août dernier, 14 personnalités proches de Laurent Gbagbo ont bénéficié d'une remise en liberté provisoire, est-ce que Mme Gbagbo peut espérer une telle remise en liberté provisoire, sachant qu'elle est inculpée pour les mêmes faits ?

Nous faisons confiance à la justice ivoirienne ; il lui reviendra d'apprécier la situation de Mme Gbagbo et de décider.

Ce sera pourtant un geste politique fort vis-à-vis du FPI, là aussi on est dans quelque chose de très politique.

Beaucoup de gestes politiques forts ont déjà été posés. Avant même ces libérations provisoires, d'autres décisions avaient déjà été prises, tout simplement parce que le président de la République, Alassane Ouattara, souhaite aller rapidement vers une situation globale d'apaisement, où le gouvernement gouverne, et où l'opposition s'oppose de façon républicaine. Donc, pour cela il faut, dans la mesure du possible, enlever tout ce qui gène.

Monsieur le ministre, la vraie raison de ce non-transfèrement à la Cour pénale internationale, n'est-ce pas pour éviter d'autres transfèrements à La Haye, plus gênants ; des transfèrements de suspects proches du camp de l'actuel président Alassane Ouattara, notamment on pense à plusieurs commandants de zone, membres des Forces nouvelles à l'époque des faits ?

Absolument pas, et je peux vous dire que nous n'y pensons même pas. Nous attendons d'être saisis, le cas échéant, par la Cour pénale internationale...

Ce qui n'est pas le cas pour l'instant ?


...Et en ce moment-là, une réponse appropriée sera donnée. Donc, c'est un jugement qui se fera au cas par cas. Nous n'avons connaissance d'aucune autre saisine.

Pourquoi la justice ivoirienne a-t-elle poursuivi, depuis avril 2011, une soixantaine de personnalités proches de l'ex-président Gbagbo, et aucune proche du président Ouattara. Est-ce que la justice ivoirienne ne donne pas raison à des organisations internationales comme Amnesty international, qui qualifienr la justice ivoirienne de justice des vainqueurs ?

Les choses sont relativement simples. Il s'agit de voir quelles ont été les responsabilités qui ont amené la crise, le fait qu'il y ait eut 3000 victimes en Côte d'Ivoire. La vraie question est là, et ces responsabilités, elles sont connues. A partir de là, la justice fait son travail et décide de poursuivre qui elle pense devoir poursuivre.

Et les autres, pourquoi ne seraient-ils pas sous les verrous, s'ils ont des implications dans le chaos ?


Là aussi, il faut que nous soyons clairs. Il appartient à la justice, aujourd'hui, de regarder dans les deux camps, de regarder en particulier dans le camp du président Alassane Ouattara, puisque c'est celui que vous évoquez. Et s'il y a des personnes qui méritent d'être traduites devant cette justice, qu'elles le soient. Donc, il n'y a absolument aucune hésitation, il n'y a pas de refus, il n'y a pas de rejet, il n'y a pas de protection non plus.

Ni auto-censure de la part de la justice ?


Nous ne pensons pas, nous faisons confiance à notre justice, nous espérons qu'elle saura apprécier toute cette situation de la façon la plus objective, de façon justement à ce que la Côte d'Ivoire sorte définitivement de la situation d'impunité qui nous a amenée dans cette crise.

Propos retranscrits par Hamadou ZIAO