Fpi: Affi veut effacer Gbagbo

  • 17/09/2013
  • Source : Nord-Sud

Le président du Front populaire ivoirien (Fpi), Pascal Affi N’Guessan, n’est visiblement pas homme à jouer, pendant longtemps, les seconds rôles. On peut tout reprocher à Pascal Affi N’Guessan, sauf le critiquer pour son manque d’ambition. Bien au contraire, le président du Front populaire ivoirien (Fpi) a de grandes ambitions! Il veut être président de la République. A peine un mois après sa sortie de prison, dans le cadre d’une liberté provisoire, l’ancien Premier ministre de Laurent Gbagbo, a décidé de combler le vide laissé par son mentor.

De Moossou où il était, lundi dernier au pays agni où il est en tournée depuis jeudi, en passant par la région de la Mé qui l’a reçu, mardi, Affi N’guessan est dans une démarche d’occupation du terrain, dans le perspective de l’élection présidentielle de 2015. Fini donc le temps où les frontistes se cherchaient un leader en remplacement de Laurent Gbagbo, mis à la touche après sa capitulation et son transfèrement à la Cour pénale internationale (Cpi) ; fini aussi le temps où les dirigeants de l’ancien parti au pouvoir, avec leurs militants, se morfondaient sur leur sort, réclamant, avant toute participation à la vie politique, la libération de Laurent Gbagbo.

Pascal Affi N’Guessan, lui, a opté pour la realpolitik, loin de la posture de la direction par intérim, conduite par Sylvain Miaka Ouretto et qui exigeait avant, la libération de Laurent Gbagbo. « Je suis sorti de prison pour aller prendre le pouvoir. L’heure n’est plus à la peur, c’est l’heure d’aller prendre le pouvoir », a-t-il laissé entendre, vendredi, à M’Batto, lors d’un meeting qu’il a animé dans cette localité. « Il est temps de changer de stratégie. Nous devons vaincre nos peurs et notre attentisme pour aller de l’avant », commente un militant frontiste réputé proche de l’ancien pensionnaire de la prison de Bouna, sur sa page facebook.

Une autre militante, toute aussi proche de Pascal Affi N’Guessan, renchérit : « (…) arrêtons nos supputations à relent tribaliste. Au contraire, nous devons être fiers que le président Gbagbo n’a pas prêché dans le désert parce qu’il a mis en place un vivier et un potentiel humain capable de gérer les affaires de l’Etat. Les hommes et les femmes dynamiques, intègres, compétents et pleins d’idées, il en a au Fpi et dans le camp des ‘’patriotes’’. Arrêtons de nous focaliser sur la personne d’Affi qui du reste n’a rien demandé, mais qui est en train de faire un grand travail de remobilisation. Et puis, il ne faut pas se leurrer, il y aura un après Gbagbo comme il y a eu un après Houphouet ».

Les frontistes sont à la croisée des chemins et, Pascal Affi N’Guessan qui était très loin de compter parmi les dauphins putatifs de Laurent Gbagbo, a opté pour l’audace, en misant notamment sur son statut de premier Premier ministre de Laurent Gbagbo et de président du Fpi. Tout en continuant de miser sur la libération de son mentor, il inverse l’ordre des priorités : se faire élire et, comme cela s’est fait au Kenya, faire pression sur la Cpi pour tenter d’obtenir la remise en liberté de l’ancien chef de l’Etat. Un pari fou, mais c’est aussi cela l’audace en politique. « Si Affi échoue là, il se sera tiré une balle dans le pied parce que ses camarades ne vont pas le lui pardonner.

Et, avant même cet échec, il devra manœuvrer fort pour garder intacte la cohésion au sein du Fpi où certains membres de la direction par intérim ont fait le choix de la politique de la chaise vide parce qu’ils sont convaincus que sans Gbagbo, ils ne peuvent pas prendre part au débat politique. Ça a montré ses limites, mais d’un point de vue militant, la base était en phase avec eux parce que, selon elle, il n’y avait pas meilleure choix que cela, c’est-à-dire la fidélité au maître et au guide, Laurent Gbagbo », analyse le politologue Mamadou Konaté. Fin stratège sur ce coup, Pascal Affi N’Guessan avait justement, quand il a rencontré le Premier ministre, Daniel Kablan Duncan, le 6 septembre 2013, préféré mettre en avant son statut d’ancien chef de gouvernement, plutôt que de réclamer les arriérés que l’Etat devrait à son parti.

Marc Dossa