Côte d’Ivoire : mariage impossible entre le RDR et le PDCI ?

  • 27/03/2017
  • Source : Jeune Afrique
Amorcé en 2005, le projet de fusion entre le RDR et le PDCI patine. Rassemblés lors des législatives, les deux alliés ont finalement renoncé à s’unir au sein d’un groupe parlementaire. Et la perspective de la présidentielle de 2020 ne fait que raviver leurs ambitions respectives…

C’est une date emblématique, qui aura influencé durablement la vie politique ivoirienne. Ce 30 avril 1994, la salle du Palais des congrès de l’hôtel Ivoire, à Abidjan, est chauffée à blanc alors que le Parti démocratique de Côte d’Ivoire-Rassemblement démocratique africain (PDCI-RDA) tient ses assises pour élire son nouveau président.

La fracture du PDCI

L’ancien parti unique fondé par Félix Houphouët-Boigny traverse une période de turbulences. Quelques mois plus tôt, après la mort d’Houphouët, Henri Konan Bédié (HKB), son dauphin constitutionnel, lui a succédé, parvenant à écarter son rival, le Premier ministre Alassane Dramane Ouattara (ADO). Mais, depuis quatre ans, un courant interne appelle à « une véritable régénération du parti ». « Toute autre voie ne pourra que [le] condamner à très court terme », expliquent ceux qu’on appelle les Rénovateurs et qui entendent faire de la réunion du 30 avril une tribune.

"Une telle alliance pourrait contribuer à réconcilier le pays. Qu’on arrête de se regarder en chiens de faïence"

Présent dans l’enceinte, Djéni Kobina, membre du comité central et porte-parole des Rénovateurs, demande la parole. Mais Bédié voit les choses autrement. Pour maintenir à distance ses rivaux – ADO, mais aussi Philippe Yacé, le président du Conseil économique et social –, il souhaite cumuler les fonctions de président du parti et de chef de l’État. De fait, il est le seul candidat à briguer la présidence du PDCI. L’intervention de Djéni Kobina est refusée… et Henri Konan Bédié est élu.

Ce jour-là, la cassure est donc actée. Un peu plus d’un mois plus tard, Kobina informera le chef de l’État de sa décision de quitter le PDCI. Le Rassemblement des républicains (RDR) verra le jour le 27 septembre 1994. S’y rallieront les partisans d’Alassane Ouattara, qui en prendra lui-même les rênes en 1999.

Éternels rivaux

Alors que se profile l’anniversaire de ce congrès historique, RDR et PDCI font toujours deux. L’alliance qu’ils forment depuis 2005 au sein du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP) aurait pourtant dû accoucher d’un parti unifié – une perspective esquissée dès mai 2010. Le mariage était prévu pour septembre 2016, puis pour le premier trimestre de cette année. Aujourd’hui, toujours rien.


Maurice Kakou Guikahue a pris la tête du groupe parlementaire du PDCI. © ISSOUF SANOGO/AFP

Pis, alors que les deux partis se sont présentés sous la même bannière aux législatives de décembre 2016, ils ont finalement renoncé à créer un groupe parlementaire unitaire. Une décision qui a suscité une certaine incompréhension dans leurs états-majors respectifs. « Nous avons fait campagne à la présidentielle, puis lors des législatives, sous la bannière du RHDP, et voilà qu’aujourd’hui on forme deux groupes distincts, s’étonne un député RDR favorable au rassemblement. Cela crée de la confusion au sein des partis et de la population. En outre, une telle alliance pourrait contribuer à réconcilier le pays, mais cette décision illisible provoque la désunion. Qu’on arrête de se regarder en chiens de faïence ! »

Le juste milieu 

Véritable serpent de mer, le projet d’un RHDP unitaire n’est pas définitivement enterré. Mais il a du plomb dans l’aile. Début février, Amadou Soumahoro, le secrétaire général par intérim du RDR, a été reçu par Bédié en marge du séminaire des parlementaires, organisé à Yamoussoukro. Selon plusieurs sources au sein du parti, HKB lui aurait déclaré que le RHDP était une fédération de partis politiques indépendants, lesquels doivent continuer à cohabiter tout en conservant leur autonomie. Quant à les fusionner, il faudra attendre l’après-2020 avant d’y songer, a-t-il poursuivi. Selon lui, la situation actuelle ne le permet pas.

La décision de créer deux groupes parlementaires distincts et d’en confier la direction à Amadou Soumahoro et à Maurice Kakou Guikahué a été prise conjointement par Alassane Ouattara et Henri Konan Bédié. Pour ce dernier, dès lors que l’unification n’avait pas été entérinée juridiquement, il n’était pas opportun de donner naissance à un groupe parlementaire RHDP...La suite sur Jeune Afrique