Ses agresseurs pistés sur Facebook

  • 27/10/2015
  • Source : lematin.ch
Un Marocain prétend avoir été agressé par quatre individus pour avoir aidé une fille. Son frère lance une chasse à l’homme et promet une récompense.

«Moi je sais qui sais mais d’abord l’argent après indice», «C’est lui que vous avez péta avec…?» «L’un des gars s’appelle…». Depuis samedi soir, le visage tuméfié de la victime d’une agression en ville de Lausanne circule sur Facebook et déchaîne les réactions et les commentaires.

Ce sont aussi et surtout les quelques lignes qui accompagnent la photo qui ouvrent la porte aux dérapages: «Hier soir sur Lausanne (vers le «Darling» rue du Lion d’or), mon frère a voulu défendre une fille qui se faisait agresser par un mec, la suite le mec et ces 3 potes lui sont tombés dessus et se sont barrer Je vous demande de partagé cette publication je donne 1000 CHF a qui peut me donner le nom d’un des 4 gars.»

La promesse d’une récompense substantielle à qui livrera les noms des quatre assaillants impliqués dans cette baston à quatre contre un et, partant, un appel plus que suggéré à la délation ont enflammé le réseau social. Résultat: près de 6500 partages. Des messages de soutien bien sûr, une police pointée du doigt évidemment et des noms d’auteurs présumés. Ou pas. Des accusations qui peuvent s’avérer gratuites et très graves. Nous avons joint plusieurs particuliers nommés. Pour certains, une plaisanterie d’un collègue de travail; pour d’autres, un embarras ambigu ou des répliques malsaines.

C’est le frère du blessé qui a diffusé cette publication sur le réseau social, ulcéré par la violence des quatre hommes qui s’en sont pris à son proche. La bastonnade serait survenue alors que ce dernier tentait de sortir une jeune femme des griffes d’un homme, qui cherchait à en abuser. Aucun des deux frères n’a souhaité s’exprimer, nous ont-ils fait savoir via… Messenger.

Plainte pénale déposée

Du côté des forces de l’ordre, elles ont été mises au courant comme tout le monde. «Par Facebook», confirme Sébastien Jost, porte-parole de la police lausannoise. «Nous mettons en garde contre l’autojustice. C’est la dernière chose à faire, même si nous comprenons l’émotion des victimes et de leurs proches. Nous invitons ces personnes et/ou les témoins de ce genre de scènes à prendre contact avec nous plutôt que de les diffuser à large échelle.»

Dimanche, le Marocain tabassé s’est décidé à se rendre à l’Hôtel de police de Lausanne, contacté à plusieurs reprises par les enquêteurs. Il a été entendu par la police judiciaire et a déposé une plainte pénale contre inconnu pour lésions corporelles. Le procureur, qui sera saisi de l’affaire, qualifiera la gravité de ses blessures (lésions simples ou graves), et déterminera si d’autres infractions doivent être retenues. En vue de déterminer les circonstances exactes et de démasquer les quatre petites frappes, plusieurs témoins doivent encore être entendus dans les jours à venir.

Hier soir, malgré la procédure désormais en marche, le post et l’appât d’un gain alléchant étaient toujours en ligne.