Opération de recensement des mutilés de la crise postélectorale : Les inquiétudes des ex-combattants

  • 23/01/2014
  • Source : Nord-Sud
Démarrée le 9 janvier dans le district d’Abidjan, l’opération de recensement des mutilés de la crise postélectorale ne semble pas rassurer les ex-combattants.

Des pieds plâtrés, des cicatrices sur divers endroits du corps, des bras amputés, les visages graves et attristés. C’est dans cette ambiance de tristesse que les ex-combattants blessés de la commune de Port-Bouët ont accueilli, lundi dernier, l’équipe chargée du recensement de ces victimes de la crise postélectorale conduite par le colonel-major Sinima Bamba, responsable de ladite opération au sein de l’Autorité pour le désarmement, la démobilisation et la réintégration

C’était au Centre pilote de Port-Bouët. Et, ce sont plus de quarante ex-combattants de cette commune qui ont répondu présents à la cérémonie d’ouverture du recensement. Ces jeunes, pour la plupart, ont été blessés lors des violents affrontements après le second tour de la présidentielle de décembre 2010 dans la ville d’Abidjan et sa banlieue.

Ce récemment vise à répertorier ces victimes et leur apporter la prise en charge spéciale que nécessite leur état de santé. Mais le scepticisme est grandissant dans le rang de ceux de la cité portuaire. Yaloué Bouréima, ex-combattant de Port-Bouët, amputé du bras droit et qui tient une enveloppe contenant ses dossiers médicaux à la main gauche, s’inquiète de la suite de l’opération de recensement.

«Nous sommes venus voir ce qu’ils vont nous dire ce matin. Nous ne savons pas s’il faut croire, car cela fait plusieurs années que nous attendons et jusqu’à présent, rien de concret ne nous est proposé pour nous soulager», se désole-t-il. Il explique avoir pris les armes pour protéger sa famille contre la fureur des miliciens proches de l’ancien président, Laurent Gbagbo.

C’était une véritable bataille. Ils (les miliciens : Ndlr), voulaient tuer mes parents. Il fallait faire quelque chose. Nous avons donc joué le rôle des forces de l’ordre, pour protéger aussi bien nos parents que le reste des populations civiles, menacées par ces miliciens. Il n’est donc pas normal qu’on nous abandonne à notre sort», regrette-t-il. Anthony Niaba Dédé est lui également amer. «Nous attendons qu’ils fassent ce qu’ils ont promis. Mais en vérité, nous ne sommes pas vraiment confiants, car nous avons vu ce qui s’est passé pendant le profilage des ex-combattants.

Les gens ont truffé la liste de faux ex-combattants et ce sont ceux-là qui ont intégré l’armée, la Douane ou d’autres services de l’Etat. Qui nous dit que ce ne sera pas encore la même chose ici», s’interroge-t-il. Selon lui, il a été blessé par balle à la cuisse dans les encablures d’une des cités universitaires de Port-Bouët. «C’est en voulant déloger les miliciens de la cité que j’ai pris le plomb chaud», raconte-t-il.

En revanche, dans son discours inaugural, le colonel-major Sinima Bamba s’est rassurant. Il a expliqué que cette opération a pour objectif de redonner espoir aux ex-combattants mutilés pendant la crise postélectorale et qui sont inaptes à tenir un projet. «Le président de la République nous a instruits à l’effet de recenser tous les ex-combattants blessés, mutilés sur toute l’étendue du territoire afin de leur apporter l’assistance adéquate», a-t-il argumenté.

«L’opération concerne les combattants de tous bords, sans distinction aucune», a-t-il ajouté. L’ancien officier des ex-Forces armées des Forces nouvelles (FaFn) a, par ailleurs, invité tous ceux qui détiennent encore des armes à les déposer parce que la guerre est terminée. «Que nos enfants qui sont cachés avec des armes et qui espèrent que la guerre va reprendre rejoignent la République», a-t-il exhorté.

C’est le 9 janvier dernier que l’opération a démarré dans le district d’Abidjan. Ce sont deux communes qui ont été pour l’heure visitées par l’équipe en charge de cette opération. Le recensement devrait s’achever hier.
 
DL (stagiaire)