Novak Djokovic - Rafael Nadal: la troisième rivalité

  • 21/11/2015
  • Source : Lematin.ch
Le Serbe et l'Espagnol ont su s’émanciper de «l’étalon Federer» pour inventer une rivalité épique. Ils attaquent aujourd’hui le 46e acte.

Peut-être est-ce une forme d’helvético-centrisme. Ou alors sommes-nous tous un peu trop attachés à cette orthodoxie des antagonismes stylistiques (Borg - McEnroe, Sampras - Agassi). Au moment de citer la plus belle rivalité du tennis actuel, notre cœur balance entre l’indémodable Federer - Nadal et le très tendance Federer – Djokovic. Et s’il fallait plutôt répondre Djokovic – Nadal?

A quelques heures du 46e acte d’une saga vieille de presque dix ans (23-22 pour Nadal), le propos n’est pas de comparer l’incomparable. Encore moins d’exclure Roger Federer, dont le talent a servi de phare à l’éthique de travail de ses cadets. Mais un coup d’œil aux finales de Grand Chelem disputées «entre superhéros» s’impose pour rappeler cette évidence: la dimension historique du duel Nadal - Djokovic (7) est plus proche de celle des Federer - Nadal (8) que des Djokovic - Federer (4).

«Moi, je n’ai pas envie de choisir entre les rivalités, expliquait vendredi Rafael Nadal. Mais je pense que le public est un peu plus attaché à celle entre Roger et moi, à cause de l’opposition de styles qui rend les matches plus tactiques.» En effet. Mais en troquant les méandres de la tactique contre des superlatifs physiques, les batailles entre «Nole» et «Rafa» n’incarnent-elles pas davantage l’évolution récente du tennis?

Dimension physique effarante
«Ils mettent assez de lift pour frapper la balle sans aucune retenue, admire Chris Evert au micro de la chaîne ESPN. En plus, ils défendent tellement bien qu’ils arrivent à contrer des coups qui auraient été gagnants contre n’importe qui. Pour moi, ces gars ont créé une version du jeu méconnaissable même pour ceux qui le dominaient il y a quelques années.»

En d’autres termes, ces deux-là ont donné une dimension physique effarante au tennis. Comme lors de la finale de l’Open d’Australie 2012, quand après 5h53 minutes d’effort, on dut sortir les chaises de jardin pour éviter un malaise en pleine cérémonie protocolaire.

Au-delà de sa dimension physique, un Nadal - Djokovic permet de réaliser que le jeu de défense est devenu la valeur refuge de ce sport. Il rappelle aussi qu’il est possible de transformer son service en faisant déjà partie du Top 10 (souvenez-vous de leurs lacunes techniques il y a dix ans).

Enfin un Nadal - Djokovic, c’est toujours un festival de glissades même sur dur, des passings improbables en bout de course et surtout deux ego qui s’entrechoquent jusqu’au point de rupture.

Pour toutes ces raisons, l’O2 Arena frétille à l’idée de retrouver ce classique de la modernité entre «le compétiteur ultime» (Rafa vu par Nole) et «le niveau au-dessus» (Nole vu par Rafa).