Microsoft veut accélèrer dans le domaine du mobile en proposant Office gratuitement

  • 07/11/2014
  • Source : lemonde.fr
Microsoft a annoncé, jeudi 6 novembre, un changement majeur dans sa politique tarifaire en mettant à disposition gratuitement sur smartphones et tablettes l’un de ses produits vedettes : la suite Office, qui comprend le traitement de texte Word, le tableur Excel et les présentations PowerPoint.

Le virage est spectaculaire dans la mesure où Office, avec son milliard d’utilisateurs, est l’une des vaches à lait du groupe. Sur l’exercice 2013, la suite a représenté un tiers du chiffre d’affaires de Microsoft : environ 26 milliards de dollars sur un total de 87 milliards. Le groupe ne publie pas le détail de ses bénéfices par produit, mais la part de Word, Excel et PowerPoint en termes de profitabilité est certainement encore supérieure.
 
Jusqu’à présent, un client non professionnel voulant disposer d’Office sur son smartphone ou sur sa tablette devait débourser un montant de 70 dollars (57 euros). Désormais, la suite de logiciels sera donc gratuite dans sa version de base. « Nous essayons de mettre Office entre les mains du maximum de personnes, quel que soit l’appareil », explique John Case, le responsable du marketing d’Office. Les utilisateurs d’un PC ou d’un ordinateur portable devront en revanche continuer à payer pour disposer de ces services. Ceux-ci resteront également payants sur smartphones et tablettes pour les clients professionnels.
 
Ce mouvement se situe dans le cadre de la stratégie définie par Satya Nadella, le nouveau patron de Microsoft, qui a décidé de faire des appareils mobiles et de l’informatique dématérialisée (cloud computing) sa priorité. Le groupe a pris cette décision, alors que les ventes d’Office commençaient à donner des signes d’essoufflement. Si la version professionnelle a progressé de 8 % l’an dernier, la hausse n’a été que de 2 % pour la version grand public.

Pire : sur les deux premiers trimestres de cette année, les ventes étaient en baisse. L’évolution de ce marché se situe dans un contexte de baisse des ventes de PC au bénéfice des tablettes et des smartphones sur lesquels Office n’a pas été disponible pendant longtemps. Les utilisateurs, qui avaient malgré tout besoin de ces outils ont donc commencé à se tourner vers des alternatives proposées par Apple (avec Numbers and Keynote), Google (avec Docs et Sheets) ou bien par des start-up comme Evernote, qui présentaient l’immense avantage, en plus, d’être gratuite en version de base.
 
Pour Microsoft, une première évolution stratégique avait été annoncée en mars avec le lancement d’une application Office pour iPad. Aujourd’hui, le groupe revendique plus de 40 millions de téléchargements de ses applications Office pour la tablette d’Apple. Quant à la version grand public d’Office 365, elle compte plus de 7 millions d’abonnés contre 1 million en juin 2013. Du coup, le chiffre d’affaires de son logiciel grand public est reparti à la hausse (+7 %) entre juillet et septembre.

Jeudi, le groupe a également annoncé le lancement d’une version adaptée à l’iPhone, ainsi que pour les appareils utilisant Android, le système d’exploitation de Google. Il y a quelques jours, Microsoft a aussi créé un partenariat avec Dropbox, permettant aux utilisateurs d’aller puiser leurs documents Office directement dans son service de stockage.

Par ailleurs, le groupe avait annoncé au printemps qu’il mettrait à disposition de fabricants de hardware intégrant des écrans de 9 pouces certaines versions de Windows, l’autre vache à lait du groupe. Le but étant là encore de rattraper son retard dans le domaine du mobile.
 
En rendant gratuit Office pour les appareils mobiles, Microsoft prend un risque mesuré. Il fait le pari d’augmenter la masse d’utilisateurs sur mobiles, sans vraiment altérer les revenus générés par les utilisateurs d’ordinateurs, qui réalisent encore le gros du chiffre d’affaires.

D’autre part, la version professionnelle d’Office, qui elle reste payante, continue de représenter 90 % du chiffre d’affaires de la suite de logiciels. La révolution culturelle par rapport au Microsoft de l’ère Steve Ballmer, le prédécesseur de M. Nadella, n’en est pas moins réelle.
 
Stéphane Lauer (New York, correspondant)