Des rapports accablants. Les experts désignés par la justice pour déterminer les causes de la catastrophe ferroviaire du 12 juillet 2013 à Brétigny-sur-Orge (Essonne) dénoncent "un état de délabrement jamais vu" du réseau, rapporte dimanche 6 juillet Le Figaro sur son site internet. Le procureur d'Evry doit faire lundi une déclaration à la presse à ce sujet.
Peu après l'accident, qui avait fait sept morts et des dizaines de blessés en gare de Brétigny, une information judiciaire avait été ouverte pour homicides et blessures involontaires. L'enquête avait été confiée à trois juges d'instruction, qui à leur tour ont missionné des experts.
Plus de 200 anomalies relevées, la plupart "connues de la SNCF"
Selon ces experts, "la plupart des anomalies étaient connues de la SNCF ou de ses agents sans pour autant" qu'il y soit remédié "de façon adéquate". Dans leurs rapports, commandés par les juges en charge de l'instruction, Michel Dubernard et Pierre Henquenet, cités par Le Figaro, soulignent que "nous ne sommes pas en présence d'un acte de malveillance, et que le processus ayant abouti à la désagrégation complète de l'assemblage s'est bien au contraire étalé sur plusieurs mois et a concerné l'ensemble de l'appareil de voie incriminé, sur lequel ont été relevées plus de 200 anomalies de divers degrés de criticités".
Le rapport précise que "l'armement a péri par fatigue, vibrations, battement, défauts de serrage, usure, etc. Tous dommages relevant de la qualité de la maintenance" et que l'état du réseau à Brétigny "aurait logiquement dû conduire la SNCF à une surveillance accrue, et surtout adaptée".
La formation des agents de maintenance dénoncée
Mettant en cause la formation des agents de maintenance, les experts soulignent que "le personnel SNCF chargé de la mise en œuvre de la maintenance des voies et appareils devrait être choisi, tout d'abord selon des critères de solide formation à la construction mécanique et de surcroît avoir reçu une formation spécialisée approfondie".
De même, ils jugent que "les prescriptions de maintenance de la SNCF, complexes, parfois difficiles à interpréter ou à appliquer par des hommes de terrain n'ont pas été parfaitement respectées (...). Ceci a conduit à une insuffisance de prise en compte et de traitement des anomalies rencontrées".
Enfin, les experts qui ont procédé à des tournées d'inspection de voies le 28 janvier alertent sur l'état du réseau en gare de Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis), qu'ils jugent inquiétant.
La SNCF conteste le rapport
Dans un communiqué commun, la SNCF et Réseau ferré de France (RFF), l'exploitant des réseaux ferroviaires français, "contestent formellement tout 'état de délabrement' du réseau à Brétigny comme ailleurs".
Pour la SNCF et RFF, "certains éléments rapportés d'une des expertises paraissent hors de proportion et hors de fondements techniques".
"Le réseau ferroviaire français fait l'objet d'une maintenance de très haut niveau et d'une surveillance constante qui exclut l'expression outrancière 'd'état de délabrement jamais vu'", poursuit leur communiqué, ajoutant que ces deux rapports, qui s'ajoutent à d'autres constatations, feront l'objet d'un débat contradictoire devant la justice.
Avec AFP et Reuters
Déraillement de Brétigny : des experts dénoncent "un état de délabrement jamais vu" - Photo à titre d'illustration