Côte d'Ivoire: des journalistes s’engagent pour un plaidoyer en faveur des soins complets d'avortement

  • 01/03/2020
  • Source : APA
Des journalistes ivoiriens se sont engagés, jeudi, à Yamoussoukro (243 km au Nord d’Abidjan) à mener un plaidoyer en faveur de l'accès à des soins complets d'avortement en Côte d'Ivoire, à l’issue d’un atelier de formation de 72 heures dans la capitale politique et administrative du pays.

Initiée par l’organisation internationale non gouvernementale, Ipas qui œuvre à élargir l'accès à des avortements sûrs et à la contraception, cette formation tenue du 25 au 27 février 2020 a permis  aux professionnels des médias de comprendre le cadre légal de l'avortement en Côte d'Ivoire pour développer une stratégie de communication sur les droits de la santé sexuelle et reproductive, notamment l'accès à l'avortement médicalisé.

Cet atelier de formation en technique de plaidoyer AFP SMART (Advance Family Planning- Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste et Temporellement défini) a débouché sur la mise en place d’un groupe de travail.

Présidé par la journaliste Rosemonde Kouadio, ce groupe de travail devra mener le plaidoyer pour l’obtention de l’adhésion des patrons de la presse ivoirienne dans la promotion du protocole de Mapouto, un instrument juridique crucial pour les droits des femmes qui élargit et renforce les droits énoncés dans d'autres instruments relatifs aux droits humains.

«On a été enrichi pour être des relais... (Car) nul n'a le droit d'être heureux seul » a dit Jean-Claude Coulibaly, le président de l'Union nationale de journalistes de Côte d'Ivoire (UNJCI) au terme de cet atelier, exhortant ses confrères à s'engager dans la sensibilisation pour des avortements médicalisés. Auparavant, Patrick Serge Appia, chef de projet à Ipas Côte d’Ivoire s’est félicité des résultats obtenus au cours de cette formation.

L’article 14 du protocole de Mapouto, met à la charge des Etats parties « l’obligation de donner accès à l’avortement médicalisé aux femmes et aux filles enceintes à la suite d’un inceste, d’un viol ou tout autre forme d’agression sexuelle ou lorsque la santé mentale ou physique de la femme ou de la fille enceinte est en danger ou encore lorsqu’il y a risque pour la vie de la femme ou du fœtus ».

Outre sa ratification, la Côte d’Ivoire a publié le protocole de Maputo dans le journal officiel du 05 janvier 2012 à travers le décret numéro 2016-226.

Conformément à l’article 123 de la constitution ivoirienne de  2016, «les traités ou accords régulièrement ratifiés, ont dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque traité ou accord,  de son application par l’autre partie».

Malgré ces engagements, la Côte d’Ivoire a l’une des lois les plus restrictives sur l’avortement avec l’article 366 qui stipule que « quiconque, par aliments, breuvages, médicaments, manœuvres, violence ou par tout autre moyen procure ou tente de procurer l’avortement d’une femme enceinte, qu’elle y ait consenti ou non est puni d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 150 000 FCFA à 1 500 000 FCFA (…).

Dr Hyacinthe Andoh Kouakou, Directeur-coordonnateur adjoint du Programme national de santé de la mère et de l’enfant (PNSME) a présenté au cours de cette formation, la situation de l’avortement clandestin en Côte d’Ivoire qui existe tant en milieu urbain qu’en milieu rural.

Selon l’Enquête démographique et de santé (EDS 2012), le ratio de mortalité maternelle est estimé à 614 décès pour 100 000 naissances vivantes en Côte d’Ivoire, l’un des ratios de mortalité maternelle le plus élevé en Afrique subsaharienne, et 14% de ces 614 décès sont liés à l’avortement clandestin.

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les avortements clandestins représentent 15% des décès maternels. 

Dans une récente étude publiée par la Perforance Monitoring and Accountability (PMA 2020, un projet américain sur les statistiques de la santé de la reproduction et la planification familiale) « on estime que 4 à 5% des femmes en âge de procréer ont eu un avortement potentiel dans les 12 mois précédant l’enquête, soit entre 210 000 et 288 000 avortements par an en Côte d’Ivoire.  

En Côte d’Ivoire, le taux de prévalence contraceptive tourne autour de 21%, alors que le pays s’est fixé un objectif de 36% à atteindre en 2020.

LB/ls/APA