Côte d'Ivoire : contestation d’ex-rebelles démobilisés à Bouaké pendant que la contestation sociale s’étend à Abidjan

  • 24/01/2017
  • Source : Rfi
En Côte d'Ivoire, les conséquences des mutineries du début du mois se font toujours sentir. Après un coup de sang de militaires dans différentes villes, le pouvoir a accordé 12 millions à quelques 8 500 soldats, pour la plupart anciens rebelles pro-Ouattara.

Une somme qui selon eux leur avait été promise durant la guerre et dans les accords de paix de Ouagadougou. Mais désormais, d'autres groupes ayant combattu demandent le même traitement, c'est le cas des anciens rebelles démobilisés et désormais dans le civil. Reportage à Bouaké.

Dans les réunions des démobilisés, le cas des primes est sur toutes les lèvres. Ibrahim Doumbia a combattu 11 ans dans la rébellion, jusqu'à la grande bataille d'Abidjan. Il estime avoir les mêmes droits que les mutins : « Tout le monde devrait percevoir la même somme. On a fait une libération, on a pris des risques, on a perdu des amis, certains ont eu les bras amputés, d’autres sont devenus fous.

Des femmes ont perdu leurs maris, il y a plein d’enfants qui ne peuvent plus aller à l’école par manque de moyens. Ceux qui trouvent que c’est beaucoup, c’est parce qu’ils ne connaissent pas l’effet des armes. Une arme c’est une chose fatale. Douze millions n’est pas cher par rapport à la vie d’un être humain. Nous qui sommes encore bien portants on vieillit. Qu’est-ce qu’on pourra faire demain ? »

Ladji Ouattara, alias Ladji Justice, montre son mollet atrophié suite à l'impact d'une roquette. Il demande qu'on respecte les anciens combattants, mais pour lui pas question de prendre une arme pour revendiquer.

« Les militaires qui sont dans les casernes aujourd’hui, ce sont les papas qui sont les démobilisés, dit-il. Mon neveu qui est dans l’armée pourra tirer sur moi ? Mon neveu qui est dans la police pourra venir me frapper ? C’est pourquoi je dis que nous n’avons pas besoin de tomber dans la violence. Nous n’avons pas d’armes, nous préférons dialoguer avec le pouvoir, qu’il nous vienne en aide. Nous sommes des pères de famille. »

Beaucoup d'ex-combattants sont au chômage. Leurs leaders craignent que la frustration entraîne certains à manifester violemment leur colère.

 la contestation sociale s’étend

Après les militaires, les gendarmes, les enseignants, les fonctionnaires et le personnel hospitalier, ce sont les pompiers qui sont entrés dans la danse des revendications en manifestant à Cocody. La manifestation a duré quelques heures avant d’être dispersée par les forces de l’ordre et des bombes lacrymogènes.

Il règne, en Côte d’Ivoire, un certain flottement par rapport aux revendications des fonctionnaires. Même s’ils ont bien avancé, la semaine dernière, avec le Comité interministériel et le chef du gouvernement qui les a reçus vendredi, ils ont toujours deux points sur lesquels achoppent leurs négociations sur les six abordés. Il s’agit des rattrapages de primes et des questions d’avancements indiciaires.

Un communiqué d’un représentant de l’intersyndicale annonçant la levée du mouvement de grève nationale a été diffusé, dimanche soir, à la télévision mais ce lundi matin, il semblait que beaucoup d’administrations ou d’écoles étaient encore bloquées ou, en tout cas, ne fonctionnaient pas à plein régime.

Pour le moins, le ministère de la Fonction publique annonce, pour mardi après-midi, une réunion de comité de dialogue social qui doit avoir lieu pour, de nouveau, aborder les revendications des fonctionnaires et surtout préparer un grand forum qui doit avoir lieu le 23 février, en Côte d’Ivoire, pour tenter de régler une fois pour toutes les points de chauffe entre le gouvernement et les fonctionnaires. Des fonctionnaires qui sont renforcés dans leur volonté d’obtenir gain de cause après que les militaires aient, eux, réussi à se faire entendre des autorités.