Alpha Condé : «Nous ne voulons plus que l’Occident nous dicte ce que nous devons faire»

  • 13/04/2017
  • Source : liberation.fr
Le président guinéen est en visite officielle à Paris jusqu'à jeudi. Entre un entretien avec Jean-Yves Le Drian et un dîner à l'Elysée, il a accordé quelques interviews.

Il glisse avec un sourire que le Libération qu’il a connu dans sa jeunesse parisienne, et auquel il dit avoir contribué, «a bien changé» : «On faisait des articles en commun, entre gauchistes : maoïstes, trotskistes, le débat était très libre.» Alpha Condé, 79 ans, a aussi changé. L’ancien opposant, président de la Guinée depuis 2010, a reçu des journalistes, mardi, dans un hôtel de luxe de la capitale française. Avant d’écourter l’entretien pour filer dîner à l’Elysée.

Quel regard portez-vous sur la politique africaine de François Hollande ?

Il a permis qu’on tourne une page dans l’histoire des rapports franco-guinéens. Le symbole de ce changement, c’est le drapeau guinéen qui flotte aujourd’hui [pendant la visite d’Etat, ndlr] sur les Champs-Elysées, ou sur les bâtiments officiels français. Quand on connaît les péripéties de cette histoire depuis 1958, c’est pour moi tout un symbole. Nous allons regretter François Hollande. Je pense particulièrement à la crise que la Guinée a traversée avec l’épidémie Ebola. Le président français est venu lui-même dans un hôpital où étaient soignés les malades. Ce fut un signal fort.

Quelles traces a laissées Ebola en Guinée ?

Ebola nous a traumatisés. Non seulement l’épidémie a mis à terre tous nos efforts économiques, mais elle a aussi atteint notre culture. Nous sommes habitués à laver les morts, parfois à les embrasser. Des pratiques qui facilitent la transmission. Il a fallu lutter contre nos propres traditions, et ceci aussi est traumatisant. Mais Ebola nous a amenés à prendre conscience de l’état de notre système de santé, qui n’était pas performant. Nous devons développer nos propres laboratoires, produire en Afrique nos propres vaccins, pour ne plus dépendre des laboratoires. L’Institut Pasteur de Conakry, actuellement en construction grâce à la (...)