Affaire «détournement de fonds dans la filière anacarde» : l’inspection général d’Etat contredit la Haute autorité de la bonne gouvernance

  • 11/06/2016
  • Source : Notre Voie
Sur saisine de l’Association des exportateurs de noix de cajou de Côte d’Ivoire (AEC-CI) aux fins d’arbitrage, l’Inspection générale d’Etat (IGE) a conduit un audit pour se faire une opinion sur le «détournement» de fonds dans la filière anacarde qui fait l’actualité du secteur agricole ivoirien.

Eh bien ! concernant particulièrement la gestion financière de la sacherie export, point déclencheur de l’audit commandité par la Haute autorité de la bonne gouvernance (HABG) auprès du cabinet Deloitte Côte d’Ivoire qui avait conclu à des malversations, le rapport de l’IGE conclut qu’il n’y a pas d’anomalie dans la gestion des fonds destinés à la sacherie export. Une conclusion qui ressort des rencontres avec le collectif des exportateurs, le fournisseur (la société Synergie 3A), la direction générale du Conseil du coton et de l’anacarde, appuyées par l’examen des documents (loi, décrets, communication en conseils des ministres) relatifs à l’organisation et au fonctionnement du Conseil du coton et de l’anacarde, à la sacherie et à la gestion de la sacherie export. «La gestion du compte bancaire dédié à la «sacherie export» ne comporte pas d’irrégularité tant du point de vue de la prise en compte dans la comptabilité du Conseil du coton et de l’anacarde que de la transaction des 200 millions FCFA d’achat de sacs de jute en avril 2015.

En effet, les 200 millions FCFA de paiement cash à la société Synergie 3A (fournisseur de sacs de jute) n’est pas un délit. En matière de gestion des deniers publics, on dispose de trois procédures de paiement : par virement, par chèque, par cash (paiement en liquide). Dans les trois cas de figure, le comptable (le payeur) s’assure de la preuve du paiement (facture ou acquit dûment signé) de la part du bénéficiaire. Or dans le paiement des 200 millions FCFA, le Conseil du coton et de l’anacarde a procédé au paiement à la suite de l’émission d’une facture et obtenu un bon de livraison de la part du bénéficiaire. Dans ces conditions, il parait difficile de dire que l’opération était irrégulière, sauf à mettre en doute la bonne foi du bénéficiaire qui a d’ailleurs dit sa préférence pour le paiement liquide, compte tenu des délais de règlement par rapport à la pression de ses partenaires», note le rapport dont Notre Voie a obtenu copie. Mieux, le collectif des exportateurs (à ne pas confondre avec l’AEC-CI), dans une lettre adressé à l’IGE, dénonce la demande de mise à disposition de ce fonds, formulée par l’AEC-CI. «A l’audition sur le sujet devant les inspecteurs, il se dit satisfait de la gestion actuelle, et ne trouve pas nécessaire de changer de gestionnaire des fonds destinés à la sacherie export», note le rapport d’audit.

Ce sont des notes qui contredisent le rapport de la Haute autorité pour la bonne gouvernance qui avait brandi une mauvaise gestion de ce fonds. Rapport sur lequel s’était appuyé le gouvernement pour suspendre le Dg du Conseil du coton et de l’anacarde, Sanogo Malamine, et le Dga, Mamadou Berthé.

L’IGE va même plus loin en déboutant l’AIE-CI dans sa requête de cogérer la sacherie à l’export avec le Conseil du coton et de l’anacarde. «Les fonds pour la sacherie export générés par institution et prélèvement de redevances sur le kg de noix de cajou exporté, sont gérés, à juste titre, par le Conseil du coton et de l’anacarde, une structure étatique. Au regard des textes en vigueur, ce dernier peut ne pas céder la gestion de ces fonds à l’AEC-CI ou à toute autre structure privée, s’il juge que cela n’est pas opportun», fait remarquer l’IGE. Encore que, note le rapport, «l’AEC-CI n’a pas encore l’existence officielle auprès du ministère d’Etat, ministère de l’Intérieur, et ne peut donc se prévaloir d’une cogestion des fonds de la sacherie export avec le Conseil du coton et de l’anacarde».

Il convient de rappeler que les fonds de financement de la sacherie export sont constitués par le prélèvement de redevances de 10 FCFA à l’exportation, institué par la République de Côte d’Ivoire. Cette redevance, au sens financier, un prélèvement fiscal obligatoire perçu par l’Etat. En conséquence, cette redevance collectée sur l’exportation de noix de cajou est un fonds public qui doit être géré par une entité publique.

J-S LIA